Absolument malicieux, trésor de fabrication d’imprimerie pourtant très simple, l’album revisite une thématique rebattue et en devient un indispensable de toutes les bibliothèques enfantines – depuis sa première parution en 2016.
Un petit garçon imagine que son grand-père vit haut perché sur une drôle de planète où tout va à l’envers : les éléphants volent et les flamants roses sont bleus. Il s’amuse des comportements farfelus de son aïeul, comme mettre du sel dans son café ou dormir dans la niche de son chien. Mais lorsque Grand-Père lui offre un bouquet d’artichauts pour nourrir un zébu imaginaire et oublie son prénom, la tristesse s’installe. Le père explique alors que le sac de souvenirs du grand-père est troué.
C’est ce célèbre poème, que Martin Niemöller (1892-1984) a écrit peu après sa libération d’un camp de concentration nazi, qui a inspiré l’autrice canadienne Andrée Poulin. Tout comme le pasteur allemand, elle dénonce, via un récit incisif et répétitif lui aussi, l’indifférence et l’inaction face à l’injustice, l’oppression et la terreur.
Cette histoire est racontée à hauteur d’un petit bonhomme, Harvey. Il aime faire des courses de bateaux dans la rue avec son frère et leur bande de copains. Pour affronter les petits soucis de la vie, il s’est inventé un héros imaginaire, capable de surmonter tous les obstacles, il s’appelle Scott Carré. Mais un jour, il revient à la maison et découvre une ambulance devant.
Quelle pépite que cet album délicat ! Tout d’abord, on relève la poésie du texte aux rimes et sonorités entêtantes dont on se délecte sans retenue. L’autrice Dianne White construit l’écrit autour de la répétition de « noirceur sur lumière » et d’un renversement sujet-verbe tout à fait à propos, faisant découvrir au passage des mots délicieux tels que brunante ou encore firmament.