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24 mai 2013

Un homme à tromper

" Je suis une journaliste jouant à l'historienne et essayant, ensuite, de transformer ce que j'ai trouvé en roman. " Cette profession de foi illustre de manière très précise la démarche de Kate Summerscale. Après avoir évoqué la naissance du roman policier avec " L'affaire du Road hill house ", la voici établissant des parallèles entre Emma Bovary et cette pauvre Isabella Robinson qui paya ses fantasmes au prix fort. L'histoire se situe au milieu du 19e siècle. A l'époque, pas ou peu de salut pour une femme en dehors du mariage. Jeune veuve avec un enfant, Isabella épouse, faute de parti plus attrayant, Henry Robinson, un ingénieur triste, ennuyeux, radin, bref un homme à tromper. Ce qu'elle fera brièvement, mais l'adultère, c'est surtout en pensées qu'elle va le commettre, pensées dont elle remplit son journal intime. Alors qu'elle est malade, Henry lui pique son journal, l'ouvre, découvre à quel point sa femme le méprise et demande le divorce. A l'époque, on s'en doute, ce n'est pas une mince affaire, et le procès va être retentissant. A travers ce fait banal, Kate Summerscale explore la société victorienne, avec un accent tout particulier sur la déplorable condition féminine. Se transformant en détective de l'Histoire, elle signe un livre aussi bluffant que le précédent.

Article paru dans ELLE

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Baker Street

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23 mai 2013

Le coup de cœur de Pascale Frey

Tout le monde se souvient de la scène mythique de " Quand Harry rencontre Sally ", où Meg Ryan simule un orgasme, en plein restaurant devant un Billy Crystal ébahi. Juste pour le plaisir (!), vous pouvez en regarder l'extrait en bas de cette chronique.

La réalisatrice de cette comédie à l'américaine, était aussi journaliste et écrivain. Ce sont d'ailleurs ces deux qualités qu'elle convoque pour ce livre écrit en 1983, qui devint un best-seller aux Etats-Unis, puis un film de Mike Nichols « La brûlure » interprété par Meryl Streep (l'actrice fétiche de Nora Ephron) et Jack Nicholson. Il est réédité aujourd'hui par les éditions Bakerstreet. Bien que ce récit soit publié sous l'appellation de fiction, l’auteure raconte une aventure tout ce qu'il y a de plus authentique; elle se contente de changer le nom des personnages, c'est tout. Dans les années 70, elle était mariée à Carl Bernstein. Oui, le Carl Bernstein, journaliste au Washington Post, qui fit tomber Nixon, en révélant le scandale du Watergate, immortalisé par Dustin Hoffman dans " Les hommes du président " de Alan Pakula. Carl et Nora, ou plutôt Mark et Rachel dans le roman, étaient mariés depuis quelques années, avaient un enfant de deux ans, et en attendaient un autre de manière imminente, lorsque Rachel découvrit que Mark la trompait avec une de leurs amies. Alternant drame et vaudeville, scènes et fugues, Nora Ephron s'est vengée à sa façon: elle a fait fortune avec sa version de cette histoire, dans laquelle son ex-mari n'est pas vraiment à la fête ! Lorsqu'elle n'avait pas le moral, Nora se consolait en cuisinant... vous trouverez donc, entre deux disputes, des recettes dont on recommande, en passant, à l'éditrice de les réunir en un petit recueil pour Noël. Et si le cœur vous en dit, paraissent en même temps chez le même éditeur, des textes récents (jusque-là inédits en français) qu'elle a écrits pour différentes magazines, [" Je ne me souviens de rien et autres réminiscences "]( http://www.onlalu.com/site/ouvrages/je-ne-me-souviens-de-rein-et-autres- reminiscences/).

Lorsqu'on lui demandait si elle croyait en Dieu, elle répondait: " Je crois qu'on ne met jamais trop de beurre dans la purée, et d'ailleurs dans tout. Voilà ce que je crois... " Tout Nora est là.

**Extrait de Quand Harry renconre Sally (avec un peu de pub, mais ça vaut la peine!)** [Version française ](http://www.youtube.com/watch?v=TgP46TTgET0)[version originale  ]( http://www.youtube.com/watch?v=F-bsf2x-aeE)

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23 mai 2013

Le coup de cœur de Pascale Frey

Après les " page turner " (des livres dont on ne peut s'empêcher de tourner les pages frénétiquement), on parle aujourd'hui de " feel good book ". Pourquoi recourir à l'anglais ? Parce qu'il faut bien reconnaître que ces trois mots sont plus percutants que " les livres qui nous font nous sentir bien "! Tout cela pour vous dir_e _que_ _le roman d'Audur Olafsdottir, " L'Embellie ", est à la fois un " page turner " et un " feel good book "! Il a paru l'automne dernier, et poursuit sa carrière auprès des lecteurs, suivant le même chemin que " [Rosa candida]( http://www.onlalu.com/site/ouvrages/rosa- candida/)" , publié il y a trois ans.

L'intrigue est originale, puisqu'en quelques jours, une femme apprend :

1\. que son mari la quitte (sans oublier d'emporter le toaster et les guirlandes de Noël) car il attend un enfant avec une autre,

2\. qu'elle a gagné à la loterie un chalet d'été en kit. Elle peut l'installer où elle veut dans le pays et, comme par hasard, va choisir le terrain face à la ferme de son enfance...

3\. selon toute improbabilité, elle est aussi l'heureuse bénéficiaire de quelques millions de couronnes remportés au loto (il lui est difficile de résister ? aux tickets que des nécessiteux ou des pompiers lui vendent)…

4\. et d'un enfant, elle qui n'en voulait pas. Ce petit Tumi, qui entend mal et voit guère mieux, est le fils de sa meilleure amie, hospitalisée pour risque d'accouchement prématuré.

Tout cela paraît loufoque ? Ça l'est, on confirme ! Que cela soit crédible ou pas n'a strictement aucune importance, car dès les premières pages, on tombe sous le charme de ce duo improbable qui s'embarque sur l'unique route du pays (une sorte de 101 version islandaise), pour rejoindre le village natal de la narratrice. Comme l'intrigue se situe en novembre, la nature, la nuit et les éléments (beaucoup de pluie et de brouillard) servent de décors à cette ballade. Cela pourrait être cauchemardesque, c'est au contraire très joyeux, car ces deux personnages hors normes sont habités par une sorte de gaieté, même si en filigrane, une gravité apporte un autre éclairage au récit. Lorsqu'on lit Audur Olafsdottir, on a l'impression de la voir sourire. Tout le monde sait que le sourire est contagieux, alors il ne reste plus qu'à trouver une expression française (ou islandaise) pour le " feel good book… "

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23 mai 2013

Lehane hors la loi

« Quelques années plus tard, sur un remorqueur dans le Golfe du Mexique, Joe Coughlin verrait ses pieds disparaître dans un bac de ciment frais. » C’est sur cette phrase pour le moins énigmatique que s’ouvre le dernier roman de Dennis Lehane, nouvel opus dans la fresque familiale des Coughlin. Si " Un pays à l’aube " s’intéressait au destin de l’aîné des fils de Thomas Coughlin, commissaire adjoint et notable respecté, " Ils vivent la nuit " relate la trajectoire du cadet, Joe, qui choisit quant à lui la voie du gangstérisme.

1926, la Prohibition bat son plein. Boston est devenu le terrain de jeu favori des bootleggers et des flics corrompus qui se livrent une guerre sans merci sur fond de règlements de comptes, d’argent sale et de trafic d’alcool. Chaque camp a ses propres lois, que l’on ne transgresse pas impunément. Joe l’apprend à ses dépens : après le braquage d’un bar clandestin appartenant à Albert White, le parrain local, il a la mauvaise idée de séduire en sus sa maîtresse et se retrouve, après un tabassage en règle, derrière les barreaux du terrible pénitencier de Charleston. Pour survivre, il se place sous la protection de Maso Pescatore, chef mafieux, pivot d’un puissant réseau de contrebande en Floride, dont Joe prend les commandes à sa sortie de prison. Déjouant les pièges du milieu, usant de son charme et de son intelligence, Joe se retrouve à la tête d’un véritable empire lorsque la Prohibition prend brutalement fin…

Remarquable photographie de la société américaine des années 30, ce récit dense et enlevé se déploie comme un conte initiatique, de la naissance à la chute d’un hors-la-loi pas tout à fait comme les autres. Car s’il semble tirer parti des effets pervers de la Prohibition, Joe ne souhaite pas devenir une figure reconnue du milieu, à l’image de son mentor, mais simplement jouir de la liberté que lui offre ce mode de vie au sein d’une société gangrénée par la violence, le racisme et le repli des communautés sur elles-mêmes. L’auteur, originaire de Boston, exploite avec beaucoup de talent et de naturel ces divers aspects sociétaux, comme autant de ressorts dramatiques régissant la destinée de ses protagonistes, intimement liés à l’univers violent qui les entoure. On attend avec impatience l’adaptation au cinéma de ce roman-fleuve dont les droits ont été achetés par Ben Affleck, récemment oscarisé, en guise de consolation une fois la dernière page tournée.

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22 mai 2013

Nos admirées

Emily Brontë, Marina Tsvetaeva, Virginia Woolf, Colette, Sylvia Plath, Ingeborg Bachmann, Djuna Barnes…

Sept écrivains. Sept pierres tombales que Lydie Salvayre, tambour battant, descelle et passe au karsher. Soufflant la vie sur leurs glorieux linceuls, elle réanime les femmes de chair au cœur de l’œuvre. Et, par son talent, rend vivants leurs célèbres visages, leurs regards posés sur nous.

Sept œuvres dont elle décrit l’influence au fil de sa propre vie littéraire, de sa vie tout court, et en cela partage une expérience qui ne manque pas de résonner pour nombre d’entre nous.

Sept “folles” qui ont en commun l’écriture au centre de leur existence, pour le meilleur et pour le pire. La force et la beauté du texte pour le meilleur, la tragédie de vivre pour le pire.

Peut-on écrire et vivre ? En sont-elles mortes ? Lydie Salvayre a-t-elle pensé à Barbe Bleue, en choisissant de rendre la vie à ces sept épouses ?

De folles, elles deviennent “allumées” quelques lignes plus bas, le choix de l’expression projetant la question dans notre époque. Où il n’y a plus à choisir entre coudre des boutons ou être excommunié.

Peut-on écrire et vivre : était-ce la question qui tourmentait Lydie Salvayre l’année où le goût d’écrire l’ayant quitté elle s’est tournée vers ses “admirées” ?

Chacune à sa manière y répondra : Sylvia douce et inquiète, Colette sceptique, Djuna dubitative, Ingeborg pensive, Tatiana résignée, Emily indifférente, Virginia réservée, le sourire de politesse.

Sept variantes, droit dans les yeux, pour une même évidence que paraphe avec fougue Lydie Salvayre. “L’œuvre est l’existence. Ni plus, ni moins.”

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